Bovins du Québec, Avril 2000, page 32.

Lumière sur les coupes noires

Éric Léonard*

Le printemps amène avec lui certains problèmes de coupe noire (dark cutter/black cut/B4). En effet, cette période marque une remontée de l’incidence de la coupe noire. Tous se souviennent de la surprise de voir apparaître un B4 sur leur classement car ce déclassement est jumelé avec une pénalité de 30 cents la livre/carcasse.

Coupe noire?

Les recherches révèlent que la coupe noire provient de multiples facteurs de stress avant l’abattage. Ce stress combiné épuise les réserves de glycogène musculaire (énergie) de l’animal et provoque le phénomène. Tout stress pris isolément peut ne pas provoquer cet état cependant, lorsque les facteurs interagissent en même temps, ils peuvent en être responsables.

La teneur en glycogène du muscle est importante, car une fois l’animal abattu et saigné, le glycogène a une influence directe sur la couleur de la viande. Sans glycogène, le pH musculaire demeure anormalement élevé, de 6,0 à 7,3, par rapport au pH normal de 5,4 à 5,6. Ce pH élevé est dû à une teneur en acide lactique plus faible du muscle, ce qui modifie les propriétés et la couleur de la viande. Il se produit d’abord une diminution du taux de diffusion de l’oxygène vers les protéines intracellulaires du muscle et de celui de la lumière d’où la couleur foncée. Cette viande n’est pas attrayante pour le consommateur et difficile à commercialiser sauf en bœuf haché.

Facteurs à risque

Génétique : tempérament et race. Les animaux britanniques et les croisements britanniques sont moins susceptibles que les races exotiques et leurs croisements.

Sexe : les taureaux et mâles mal castrés (stags) sont plus susceptibles que les bouvillons. Des risques sont associés aux femelles qui tombent en chaleurs juste avant ou dans le transport.

Mélange des animaux : ne pas mélanger des animaux étrangers, ou de sexe différent, car ils se battront pour déterminer une nouvelle hiérarchie sociale. S’il faut absolument le faire, il est conseillé de les mélanger qu’à la toute dernière minute tout en s’assurant d’un délai d’abattage rapide. Lorsque fait quelques jours à l’avance, les animaux n’ont pas le temps nécessaire pour régénérer l’énergie dépensée.

Alimentation : un changement d’alimentation rapide et drastique n’est pas conseillé. Les animaux ne devraient pas être rationnés en aliments, ni en eau, car cette pratique accélère la réduction de glycogène musculaire.

Implants : les recherches démontrent que les implants ont un petit effet significatif. Toutefois, la stratégie d’implantation peut avoir un impact plus grand.

Entassement : les animaux trop tassés sont plus susceptibles de déclasser.

Conduite du transporteur : une conduite lente par temps chaud diminue la circulation de l’air dans le camion. L’été, éviter le transport durant les heures chaudes et les bouchons de circulation automobile.

Carcasses maigres : les carcasses maigres refroidissent plus rapidement, ce qui ralentit le métabolisme post mortem et accroît la fréquence du déclassement.

Animaux malades : ces animaux sont plus fragiles et susceptibles de déclasser.

Température : les changements brusques de température jusqu'à sept jours avant l’abattage, principalement un passage de très chaud, à très froid. Au Canada, la période critique s’étend de juillet à novembre. Peut être relié au changement du nombre d’heures de lumière.

Temps d’attente à l’abattoir : très forte corrélation entre le temps passé dans les enclos à l’abattoir et la fréquence du déclassement. Risques plus élevés lorsque l’abattoir retarde l’abattage.

Temps : le stress engendré entre 12 et 48 heures avant l’abattage est le plus dommageable. Un animal stressé peut prendre jusqu’à sept jours pour rétablir son équilibre énergétique.

Manipulation : l’utilisation du bâton électrique est un des facteurs les plus incriminant. Le fait de marcher régulièrement dans les parcs habitue les bovins à la présence humaine et réduit le stress lors du chargement. Il est déconseillé de crier auprès des animaux.

Bonnes pratiques

Suite aux visites effectuées dans le cadre du projet Bœuf Qualité Plus, voici quelques conseils pour diminuer les risques de coupe noire :

En suivant ces quelques règles, vous diminuerez le stress de vos animaux, et par le fait même, le vôtre aussi!

*agr., agent de projet Bœuf Qualité Plus.