Bovins du Québec, juin 1999, p.

Parc d’engraissement

Six critères pour un diagnostic rapide

Nicolas Paillat* et Doris Pellerin**

Au printemps 1998, Bovins du Québec vous présentait les résultats préliminaires d’une étude sur les facteurs de succès des parcs d’engraissement du Québec. L’étude est maintenant complétée, en voici les derniers résultats.

Rappelons tout d’abord l’objectif de l’étude. Il s’agit de cibler quelques indicateurs qui détermineront rapidement les forces et les faiblesses de votre entreprise et les sources d’amélioration. L’analyse permet également de classer votre entreprise selon une évaluation globale de sa performance. Dans un environnement économique difficile et avec la réduction vraisemblable du soutien financier de l’État pour le maintien du revenu, il est important de pouvoir mettre le doigt sur les lacunes de l’entreprise.

Six critères ont été retenus. Ils permettent tous d’expliquer le revenu de l’entreprise et d’en évaluer les performances.

Critère 1 : Rapport de la marge sur achat/coût des aliments

Les deux principaux éléments d’un parc d’engraissement sont la marge sur achat et le coût des aliments. La marge sur achat, c’est la différence entre les ventes et les achats d’animaux. Le coût des aliments comprend les aliments achetés et les dépenses pour les productions végétales. Ces deux critères sont étroitement liés dans la mesure où le prix des animaux et le prix des grains suivent la même tendance. C’est donc davantage la différence entre ces deux éléments plutôt que chaque élément distinct qu’il faut considérer. En revanche, au niveau de l’analyse, il sera utile de séparer les deux indicateurs pour mieux isoler la source de faiblesse.

Critère 2 : Livres de gain produites par UTP

L’efficacité du travail est un élément essentiel. Des différences importantes existent entre les parcs quant à l’organisation du travail. La fonctionnalité des équipements pour l’alimentation et les soins des animaux peuvent expliquer des performances fort différentes.

Par rapport aux résultats préliminaires, on utilise maintenant les UTP totales plutôt que les UTP affectées à l’activité bouvillons. Cela pose moins de problèmes pour l’évaluation de cet indicateur. Si l’entreprise est moins spécialisée, le résultat obtenu pour ce critère sera donc plus faible. Il convient donc d’en tenir compte pour l’analyse.

Critère 3 : Charges de machinerie, bâtiments et amortissements par dollar de produit

Les dépenses liées aux équipements affectent de façon directe la rentabilité de l’entreprise. Pour des entreprises de taille restreinte, il convient de limiter les dépenses en machinerie; l’entreprise n’est pas en mesure de rentabiliser de tels investissements. Il est nettement préférable d’acheter des animaux supplémentaires plutôt que de la machinerie qui sera, dans bien des cas, grandement sous-utilisée.

Critère 4 : Gain moyen quotidien (GMQ)

Le gain de poids, c’est ce que vous vendez. Pas de mystères, il doit être d’un niveau suffisant. Attention aux excès toutefois. Le gain que vous obtenez doit être réalisé avec des coûts limités (référence au critère 1). Un gain de poids insuffisant allonge la période d’engraissement. Vous entretenez donc les animaux sur une plus longue période, ce qui coûte cher.

Critère 5 : Poids moyen de vente

Les animaux que vous vendez doivent avoir un poids suffisant. Si vous vendez trop tôt, vous serez pénalisé car vos animaux sont insuffisamment " finis ". Une vente hâtive anéantit tous les efforts que vous avez fait pour engraisser les animaux. Il est important de bien évaluer leur poids pour en tirer le maximum de profit.

Critère 6 : Dette totale par dollar de produit

L’endettement n’est pas un élément direct de l’efficacité de l’entreprise. Toutefois, une lourde dette réduit la rentabilité de l’entreprise de façon importante en raison des remboursements à effectuer. Le poids de la dette doit être limité pour ne pas fragiliser l’entreprise au niveau financier.

L’utilisation des critères

En utilisant ces critères, vous réalisez un diagnostic des forces et des faiblesses de votre parc d’engraissement. Cela vous permet donc de déterminer rapidement et à l’aide d’un minimum d’information quels sont les secteurs qui réduisent la performance économique de votre entreprise.

Pour chaque critère des seuils d’efficacité et d’inefficacité ont été déterminés. Le seuil d’efficacité est l’objectif que vous devez viser. Quant au seuil d’inefficacité, la consigne est de s’en tenir éloigné…

Il vous suffit de reporter le résultat que vous obtenez pour chacun des critères sur la " toile d’araignée ". La ligne à l’intérieur rejoint les seuils d’inefficacité. La ligne à l’extérieur relie les seuils d’efficacité. Donc plus votre courbe est vers l’extérieur du cercle, plus votre entreprise est dans une bonne situation. Les résultats à l’intérieur sont les faiblesses à améliorer. Le tableau 1 présente les seuils d’efficacité et d’inefficacité pour chacun des critères.

Prenons un exemple avec le modèle du CRÉAQ. La figure 1 présente les résultats pour cette entreprise type ( pour l’endettement, comme aucune donnée n’est disponible, le résultat indiqué est entre les seuils d’efficacité et d’inefficacité ). Ce modèle est particulièrement performant au niveau des livres de gain par UTP et des charges de machinerie. Aucun résultat ne se situe sous le seuil d’inefficacité, ce qui en fait une entreprise performante. Des améliorations devraient être apportées au niveau du GMQ et du poids moyen de vente.

Comment exploiter le diagnostic?

Une entreprise est composée de plusieurs activités inter-reliées. La performance globale de l’entreprise est toujours limitée par les secteurs les plus faibles. Il vous faut donc chercher des solutions pour améliorer les faiblesses plutôt que d’augmenter encore des forces qui ne pourront être pleinement valorisées. Un résultat faible pour un critère doit donner lieu à une analyse plus poussée pour permettre de mettre le doigt sur la source du problème.

Enfin, sachez que les conseillers des syndicats de gestion et du MAPAQ auront prochainement des copies de cet outil. N’hésitez donc pas à les consulter pour une évaluation de votre parc.

Cette étude a été financée par Agriculture et Agroalimentaire Canada. Un comité, composé de membres de la FPBQ, du MAPAQ et de la FSGAQ, a participé à l’étude.

* Agri-Gestion Laval, FSSA, Université Laval

** Professeur, département des sciences animales, Université Laval

 

 

 

Tableau 1. Seuils d’efficacité et d’inefficacité des parcs d’engraissement

Seuils Efficacité Inefficacité

Marge sur achat/coût des aliments < 1,2 > 1,5

Livres de gain produites par UTP > 300 000 < 150 000

Charges machinerie, terres et

bâtiments par dollar de produit < 0,08 > 0,15

Gain moyen quotidien (lb/jour) > 2,75 < 2,20

Poids moyen de vente (lb) > 1 340 < 1 270

Dettes totales par dollar de produit < 0,40 > 0,70