Bovins du Québec, Avril 2000, page22.

Les quatre maladies

Geneviève Côté*

Certaines maladies présentes dans les troupeaux de bovins du Québec peuvent avoir un impact négatif important sur la productivité des élevages, du commerce et de la santé publique. Parmi celles-ci, quatre d’entre elles retiennent l’attention depuis les dernières années, il s’agit de la paratuberculose, de la leucose bovine enzootique, de la diarrhée virale bovine et des infections à Neospora caninum. Dans un avenir rapproché, il sera important d’établir la proportion de troupeaux infectés pour assurer la rentabilité et la qualité des élevages bovins québécois.

Diarrhée virale bovine (BVD)

La diarrhée virale bovine est une maladie causée par un virus. Il peut provoquer une maladie aiguë, passagère, bénigne ou parfois non apparente, dépendant de la virulence de l’agent causal et de la résistance de l’animal. Les principaux symptômes rencontrés sont : la perte d’appétit, la fièvre, les problèmes respiratoires, la diarrhée, la salivation, les ulcères à la gueule, aux naseaux et parfois aux onglons, la diminution de production, les problèmes reproducteurs chez les vaches (retour en chaleurs, momifications, avortements, non délivrance et infections de l’utérus) et la mortalité. De plus, ce virus peut diminuer l’efficacité des mécanismes de défense naturelle de l’animal infecté. Ce phénomène, appelé immunosuppression, rend la bête plus vulnérable et permet à d’autres micro-organismes présents d’exercer une action néfaste sur celle-ci. Dans un troupeau fortement infecté, la maladie peut durer plusieurs semaines.

L’infection par le virus du BVD occasionne un phénomène particulier : la création d’immunotolérants. Le virus qui infecte une vache gestante non immunisée va atteindre le fœtus. Si l’infection survient entre le 40e et le 120e jour de la gestation, la vache peut donner naissance à un veau immunotolérant, qui peut paraître tout à fait normal. Un immunotolérant est donc un animal dont le système de défense tolère la présence du virus, sans pouvoir l’éliminer; il est un porteur du virus à vie et constitue donc une source d’infection permanente pour les autres animaux du troupeau. La présence d’un seul animal immunotolérant suffit à aggraver les problèmes de santé d’un troupeau, tels les problèmes reproducteurs et respiratoires. Il est donc important, à l’intérieur de l’élevage, d’identifier les animaux immunotolérants et de les expédier à l’abattoir rapidement et de vacciner les animaux contre le BVD.

Selon des études effectuées dans différents pays, entre 0,5 et 2 % des individus dans une population bovine seraient porteurs du virus du BVD. Dans plusieurs états du nord des États-Unis, la prévalence de troupeaux laitiers abritant un ou des immunotolérants est de l’ordre de 15 %.

Contamination

- Contact direct entre un animal infecté et un animal sain;

- Milieu contaminé par les sécrétions et les excréments d’un animal infecté;

- Sang et semence d’un animal infecté;

- Air contaminé par l’expiration ou la toux d’un animal infecté;

- Vache gestante infectée qui le transmet à son fœtus.

Paratuberculose (Maladie de Johne)

La paratuberculose est une maladie infectieuse chronique des ruminants domestiques et exotiques, notamment les bovins laitiers et de boucherie, les moutons et les chèvres. Elle est due à une bactérie appelée Mycobacterium avium ssp. paratuberculosis, qui cause l’épaississement de la paroi intestinale de la vache, ce qui réduit les capacités d’absorption des nutriments. La paratuberculose se manifeste par de la diarrhée intermittente mais persistante, une perte de poids progressive, une baisse de la production laitière et éventuellement la mort. La bactérie est éliminée dans le fumier de l’animal et peut survivre plus d’un an dans l’environnement. Les veaux de six mois et moins sont les plus susceptibles. Cette maladie ne se traite pas et progresse très lentement. Même si la plupart des vaches sont infectées lorsqu’elles sont de jeunes veaux, les signes cliniques quant à eux n’apparaissent que deux à cinq ans plus tard.

Aux États-Unis en 1997, une enquête a estimé à 0,4 % le nombre de bovins de boucherie contaminés alors que 7,9 % des troupeaux comptaient au moins un animal affecté. Chez le bovin laitier, selon les études, la prévalence de troupeaux infectés variait entre 22 % et 34 %. Des études récentes en Ontario et dans les Maritimes démontraient une prévalence de 34 et 30 % respectivement chez les bovins laitiers. Toujours chez nos voisins du sud, on estime que la paratuberculose coûterait à l’industrie laitière entre 200 et 250 millions de dollars annuellement.

Plusieurs pays ont déjà mis en place des programmes de contrôle de cette maladie et des restrictions concernant l’importation de bovins vivants, d’embryons ou de semence. En santé publique, une controverse existe actuellement concernant l’association possible entre la paratuberculose et la maladie de Crohn chez l’humain, une maladie intestinale chronique affectant principalement les gens âgés entre 15 et 35 ans. Cette incertitude sur le risque potentiel de cette maladie pour la santé publique nécessite une attention particulière et pourrait intensifier les pressions pour l’implantation d’un programme de contrôle.

Contamination

Leucose bovine enzootique (LBE)

La leucose bovine enzootique est une maladie causée par un virus (BLV – Bovine Leukosis Virus) qui affecte les bovins, les caprins et les ovins. Cette maladie peut prendre des mois ou des années à se développer (rarement chez des sujets de moins de deux ans). Seulement 1 à 5 % des bovins infectés vont développer la forme cancéreuse qui se caractérise le plus souvent par l’apparition de tumeurs malignes dans plusieurs organes (lymphome malin). Les signes cliniques généraux sont : perte d’appétit, baisse de productivité et perte de poids. D’autres signes cliniques peuvent apparaître, dépendant des organes atteints, comme par exemple des troubles cardiaques (cœur) ou digestif (caillette). Cette maladie ne se traite pas et entraîne le plus souvent la réforme de l’animal dont la carcasse est par la suite condamnée à l’abattoir.

Une enquête effectuée aux États-Unis en 1997 a estimé à 10,3 % le nombre de bovins de boucherie affectés par ce virus et 38 % des troupeaux testés comptaient au moins un animal séropositif. Au Canada, en 1980, la proportion de troupeaux de bovins de boucherie infectés était de 11 % et pour les troupeaux de bovins laitiers, de 40 % (36 % pour le Québec).

Dans les élevages avec un nombre élevé d’animaux infectés, la morbidité et la mortalité dues au lymphome malin peuvent avoir une importance économique significative; mais, les principales pertes économiques sont attribuables à la perte de marchés puisque de nombreux pays interdisent l’importation d’animaux porteurs d’anticorps contre le BLV, de sperme ou d’embryons provenant d’animaux contaminés.

Contamination

Par un lymphocyte (globule blanc du sang) infecté par le virus :

- de la mère au fœtus durant la gestation (chances < 15 %);

- par contact soit de nez à nez, de vulve à vulve ou autrement si présence de sang;

- par le colostrum et le lait d’une vache positive (chances d’environ 2 %);

- par les insectes suceurs de sang;

- par des instruments contaminés par du sang (pince-nez, écorneurs, injections, etc.).

Neospora caninum

Neospora caninum est un parasite identifié à l’origine chez le chien mais maintenant reconnu comme une cause importante d’avortement chez la vache. Le parasite peut aussi être présent chez les rongeurs et les canidés sauvages (coyotes, renards). Dans les troupeaux infectés, les vaches sont plus à risque d’avorter, de donner naissance à des veaux morts nés et d’être réformées précocement pour des problèmes de reproduction. Cette maladie entraîne donc des pertes économiques substantielles dans un élevage affecté. Les avortements sont plus fréquents entre les quatrième et septième mois mais peuvent aussi survenir à n’importe quel moment au cours de la gestation. Les vaches qui avortent ne sont pas cliniquement malades. À ce jour, aucun traitement n’a encore fait ses preuves. Les États-Unis ont mis un vaccin sur le marché mais son efficacité reste à prouver.

En 1998, 39 % des fœtus de bovins avortés soumis aux laboratoires de pathologie animale du MAPAQ étaient infectés par Neospora caninum.

Contamination

- Ingestion accidentelle d’excréments de chiens, de canidés sauvages ou de rongeurs contaminés;

- de la mère au fœtus pendant la gestation.

* d.m.v., Direction de l'épidémiosurveillance et de la santé animale, MAPAQ.