Bovins du Québec, Février 2000, page 22.

Reportage bouvillons d'abattage

L'élevage à forfait, un monde méconnu

Yves Charlebois*

À Victoriaville dans le rang Chicago, Yvan Roux, sa conjointe Sylvie Loiselle et leurs employés Claude Thibodeau et Yannick Demers procéderont cette année à la semi-finition de 2 000 têtes de bovins.

Ils reçoivent à la ferme des veaux d'embouche de 450 livres et ils les élèvent pendant 150 jours pour les rendre à un poids approximatif de 875 livres. Ces bovins seront ensuite dirigés vers un parc d'engraissement où ils atteindront leur poids d'abattage d'environ 1400 livres. Parallèlement à ce travail de semi-finition à forfait, Yvan Roux possède son propre parc d'engraissement d,une capacité de 500 têtes, situé dans le avenue Pie-X à Victoriaville.

D'abord producteur laitier depuis 1978, Yvan Roux a vendu son quota et ses animaux en 1991 pour se consacrer à la culture de ses terres en plus de démarrer son parc d'engraissement. Ce n'est que plus tard qu'il a développé le travail à forfait.

Le forfait

En 1997, le propriétaire d'un parc d'engraissement de Saint-Rémi-de-Tingwick approche l'entreprise pour de l'élevage à forfait. Ce parc achète des veaux d'embouche aux encans et les engraisse jusqu'à l'abattage. Pour faire du volume, il faut de l'espace et de la nourriture en abondance. Après entente, il retient donc les services d'Yvan Roux fort de son expérience dans l'engraissement des bovins de boucherie.

La formule est fort simple. Le propriétaire du parc livre ses animaux chez M. Roux. Ceux-ci sont pesés pour avoir le poids total d'animaux livrés. Dans le cas présent, le parc fournit les médicaments, au besoin. De son côté, Yvan Roux offre le gîte et le couvert à ses nouveaux pensionnaires pendant 150 jours et fournit les implants. L'assurance stabilisation est payée par le propriétaire des animaux. Notons qu'un contrat officiel est passé entre les deux parties pour y décrire toutes les formalités d'usage.

À la fin de la période d'élevage, les animaux sont transportés vers le parc d'engraissement. Mais avant de partir, on doit peser les camions pleins. La différence de poids entre celui de l'arrivée des veaux et celui de leur départ déterminera le salaire de l'éleveur. Dans le cas d'Yvan Roux, il reçoit en moyenne 70 cents la livre de gain pour chacun de ses animaux, soit environ 300 $ par tête. Toutefois, ce taux variera avec les années selon les conditions de marché et de prix qui prévalent. Les mortalités sont assumées par M. Roux. En général, le taux de mortalité tourne autour de 1,5 %. Les animaux gagnent en moyenne 2,8 livres quotidiennement. Cette moyenne est établie en tenant compte des mortalités.

Pour Yvan Roux, l'élevage à forfait permet de grossir rapidement son entreprise sans déranger son gérant de banque. En 1997, il a débuté avec 400 têtes à forfait et en 2001, il prévoit atteindre plus de 2 500 têtes. Les profits générés lui permettent d'améliorer et d'agrandir ses installations pour le forfait ainsi que de grossir le cheptel et les infrastructures de son propre parc d'engraissement.

Les cultures

Pour nourrir tous les animaux, on cultive 1000 acres en maïs-grain, en maïs-ensilage, en foin sec et en ensilage de foin. Pour permettre une bonne rotation des cultures, on cultive de la fève soya. Le revenu généré par la vente du soya sert à l'achat de tourteau de soya. Ce produit, issu des pressoirs d'huile de soya, donne un apport généreux en protéine à ses animaux. Cette année, 6000 tonnes de maïs-grain et d'ensilage seront nécessaires pour nourrir les animaux à forfait et ceux de son cheptel. L'entreposage est effectué dans un silo-fosse de 120 pieds de large par 210 pieds de long. Pour le fourrage, on utilisera 600 balles rondes enrobées de foin sec. D'autre fourrage sera acheté lors d'encans de ferme.

Les bovins en semi-finition reçoivent trois types de ration composés principalement d=ensilages. Des minéraux médicamentés sont ajoutés à la ration durant les 30 premiers jours. La quantité de minéraux médicamentés donnée est par la suite diminuée pour être complètement éliminée au soixantième jour d=élevage. Ils sont nourris en visant un gain de poids de trois livres par jour.

Yvan Roux ne voit que des avantages à l=élevage à forfait. A Je cherche les désavantages, mais je n'en trouve pas @, explique-t-il. Cependant, pour réussir, il faut minimiser les dépenses. Ses trois bâtiments d=élevage ont été bâtis de façon économique. Son dernier, d=une dimension de 500 pieds par 250 pieds, lui aura coûté 70 000 $.

Pour prévenir les maladies et assurer le confort des animaux, les bâtiments sont nettoyés complètement deux fois par semaine. Une fois l=étable nettoyée, on jonche le sol de béton de ripe de bois. Le travail est facilité par un système de barrières pour manipuler les animaux. Le fumier est placé en andains dans les champs, même l'hiver.

De son côté, Sylvie Loiselle voit à la comptabilité de l'entreprise. Elle est membre d'un syndicat de gestion. Tout le travail comptable de la ferme est informatisé.

Engagement

L'entreprise est très engagée dans son milieu. Présentement, la Coopérative financière de bœufs du Centre-du-Québec, sous la supervision du MAPAQ, effectue un projet chez les Roux-Loiselle. Cinq producteurs vache-veau font engraisser chez lui 90 têtes jusqu'à la finition complète. On cherche à mesurer les performances de la génétique des animaux par des pesées régulières et à définir une nouvelle formule pour l'engraissement à forfait. De plus, Yvan est membre du conseil d'administration du Syndicat des producteurs de bovins de boucherie du Centre-du-Québec et siège sur le comité de mise en marché bouvillons d'abattage de la Fédération.

* journaliste à la pige