Bovins du Québec, Avril 2002,

 

Les consommateurs et les résidus

Lucie Bérubé*

Au cours des cinq dernières années, de nombreuses crises ont ébranlé le secteur agroalimentaire et ce, à travers le monde. Que l’on mentionne la crise de la vache folle et l’épizootie de fièvre aphteuse survenues en Europe ou encore les alertes à la maladie du hamburger qui nous reviennent à chaque printemps avec le retour du barbecue, ces événements ont un impact certain sur la confiance qu’ont les consommateurs à l’égard des produits alimentaires qu’ils consomment.

 

Selon une étude réalisée par la Filière agroalimentaire du Québec en mai 2000, plus de trois Québécois sur quatre (76 %) se disaient concernés par la façon dont sont produits les aliments qu’ils consomment. À juste raison ou non, plusieurs consommateurs sont maintenant soucieux de la composition des aliments qu’ils retrouvent aujourd’hui dans leurs assiettes. D’ailleurs, ce sont davantage les diplômés universitaires (88 %), les professionnels (84 %), les personnes âgées entre 45 et 54 ans (83 %) et les femmes (81 %) qui se questionnent sur les méthodes de production employées pour produire les aliments.

 

Cette étude révélait également que plus de sept Québécois sur dix (73 %) demeurent tout de même confiants quant à la sécurité des produits consommés au Québec. Ce qui veut dire que les consommateurs québécois, bien qu’ils se questionnent sur les méthodes de production actuellement utilisées en agriculture et en production animale, sont en général confiants quant aux aliments produits et vendus au Québec.

 

Qu’en est-il de la viande?

Cependant, les nombreuses crises européennes ont amené le consommateur québécois à s’interroger davantage quant à la qualité de la viande produite ici. Selon un sondage Léger Marketing réalisé en juillet 2001 auprès de plus de mille adultes, deux Québécois sur trois (66 %) croient que la viande qu’ils mangent (bœuf, porc ou poulet) contient des résidus tels que des médicaments, des antibiotiques, des hormones de croissance, etc. Cette croyance est d’autant plus marquée chez les diplômés universitaires (79 %), chez ceux dont le revenu annuel par ménage est de 60 000$ et plus (77 %) ainsi que chez les personnes qui occupent un emploi (70 %).

 

De surcroît, six Québécois sur dix supposent que l’utilisation d’antibiotiques dans l’élevage du bœuf, du porc et du poulet (64 %) de même que l’utilisation d’hormones de croissance dans l’élevage du bœuf (58 %) représentent un risque élevé pour la santé humaine (figure 1). Une proportion supérieure de répondants estime même que l’utilisation d’antibiotiques en production animale présente un risque encore plus élevé pour la santé humaine que l’utilisation d’hormones de croissance.

 

 

À la recherche d’informations

Ainsi, le sentiment d’insécurité relativement à la présence possible de résidus dans les viandes de même que la perception du risque élevé pour la santé humaine associé à l’utilisation d’hormones de croissance et d’antibiotiques peuvent en partie s’expliquer par la méconnaissance qu’ont les consommateurs de ce sujet délicat. En effet, près de sept Québécois sur dix (69 %) se considèrent mal informés sur ce sujet, soit 28 % très mal informés et 41 % plutôt mal informés.

 

De ce fait, c’est sans surprise que les risques associés à l’utilisation des hormones de croissance et des antibiotiques s’avèrent le principal sujet d’information désiré par les personnes interrogées, et ce, dans une proportion de 48 % (tableau 1).

 

L’avenir est-il au biologique?

Est-ce que toute la confusion et le sentiment d’insécurité à l’égard de la production animale inciteront le consommateur à se tourner vers la viande biologique? Si l’on se fie aux résultats de notre sondage, la réponse peut être oui. En effet, plus de trois consommateurs sur cinq (62 %) affirment qu’ils seraient intéressés à acheter des viandes certifiées biologiques et ce, même si celles-ci étaient vendues à un prix plus élevé. Des données qui portent à réfléchir, d’autant plus que la certification biologique (50 %) est considérée, à égalité avec la réputation du manufacturier (49 %), comme le principal critère d’évaluation de la qualité et de la sécurité d’un aliment.

 

Informer pour regagner la confiance

L’information constitue donc l’une des principales clés pour regagner la confiance du consommateur à l’égard de la production animale. En effet, bien qu’il ne faille pas perdre de vue qu’une majorité de consommateurs québécois sont confiants quant à la sécurité des produits qu’ils consomment, leur confiance a tout de même été ébranlée.

 

L’information transmise doit donc prioritairement permettre de rassurer le consommateur et de le renseigner sur les techniques de production actuellement utilisées afin que le sentiment de crainte face place à la compréhension.

*diététiste, M.B.A., chargée de recherche, Léger Marketing

 

Tableau 1. Parmi les informations suivantes, laquelle aimeriez-vous le plus recevoir afin d’être mieux informé à propos des résidus présents dans la viande tels que les hormones de croissance, les antibiotiques, etc.? Est-ce…

%

…les risques associés à leur utilisation

48 %

…la définition de ce que sont les hormones de croissance et les antibiotiques utilisés dans l’élevage du bétail

22 %

…la fréquence (le nombre de fois) selon laquelle les hormones de croissance et les antibiotiques sont utilisés

15 %

…les avantages liés à leur utilisation

7 %

...ne sait pas

8 %

 

 

Figure 1. Selon vous, l’utilisation d’hormones de croissance dans l’élevage du bœuf et l’utilisation d’antibiotiques dans l’élevage du bœuf du porc et du poulet représentent-elles un risque pour la santé humaine? (n=1002)

Risque élevé : 58%
 
Risque élevé : 64%
 

Utilisation d’antibiotiques