Bovins du Québec, avril-mai 2002
Vache-veau
La gestion des
enclos d’hivernage
Guy Lapointe*
L’hiver 2002 a été assez marquant. Le peu de froid que nous avons connu a parfois été favorable pour les producteurs de bovins. Pour ceux qui ont eu des vêlages de décembre à février, ce fut particulièrement doux et cela diminuait les risques de perte de veaux à la naissance dû au froid. Toutefois, le temps doux n'a pas eu que des avantages, entre autres pour la gestion des enclos d’hivernage où, à quelques occasions, le fumier de quelques jours restait dégelé.
Un
des défis de la gestion des enclos d’hivernage est de s’assurer que le sol gèle
et qu’il se forme un amas de fumier gelé sous l’aire d’alimentation :
c’est la technique de la glacière. Par expérience, nous avons observé que si on
utilisait trop de litière durant les périodes froides, celle-ci agissait comme
un isolant et le fumier ne gelait pas. Ainsi, on recommande donc d’utiliser une
quantité moyenne de 2,5 kg de litière par vache par jour. Toutefois, à certains
moments, cette quantité requise peut être supérieure ou inférieure.
Dans
ce 2,5 kg de litière, la perte de foin à la mangeoire doit être incluse. En
général, celle-ci est estimée à 1,5 kg (10 %). Pour compléter jusqu’au 2,5 kg
de litière recommandé, le producteur doit donc mettre une quantité
supplémentaire de 1 kg de litière par vache par jour, soit 200 kg par vache
pour la période totale d’hivernement (une balle ronde de paille).
Le
principal objectif de la gestion des enclos est d’utiliser la température
froide de l’hiver pour favoriser le gel du fumier sous l’aire d’alimentation.
La superficie de cette aire équivaut à environ 20 % de la superficie totale de
l’enclos. Il est donc nécessaire de faire une rotation des mangeoires dans
cette surface.
Lors
de temps doux, les mangeoires doivent être déplacées à l’endroit où le fumier
est gelé. Les vaches se tiendront près des mangeoires et de l’endroit où l’on
ajoute de la litière. Quand le fumier sera gelé, les mangeoires pourront être
ramenées sur la surface précédente et si nécessaire, on y appliquera de la
litière (paille ou bran de scie) ce qui permettra de maintenir notre glacière.
Les
brise-vent portatifs placés près des mangeoires incitent les animaux à rester près
de celles-ci et facilitent également la formation de la glacière. Si on doit
déplacer les mangeoires, les brise-vent devront également être déplacés.
À
la fin de l’hiver, la quantité journalière de litière requise est plus élevée
puisqu’on doit conserver la glace qui s’est formée durant la période froide en
plus de maintenir un environnement adéquat pour les animaux.
Bien
géré, la technique de la glacière permet de diminuer les pertes
environnementales. Lorsque le fumier est gelé, les risques d’infiltration et
d’écoulement sont minimes, c’est pourquoi il est important que cet amas demeure
gelé le plus longtemps possible. Aussi, au moment du dégel printanier, comme la
bande végétative n’est pas piétinée, la végétation de celle-ci débutera tôt
dans la saison. L’eau de ruissellement et celle issue de la lente décongélation
de l’amas de glace s'écouleront sur la bande végétative et cette végétation
sera capable d’absorber les éléments fertilisants. Si la technique de glacière
est bien réussie, la surface portante sera plus longue pour les animaux et la
durée d’utilisation de l’enclos à haute densité sera donc plus courte.
Dès
que la surface de l’aire d’alimentation n’a plus assez de capacité portante,
les animaux doivent être transférés sur un site ayant une meilleure portance ou
dans un enclos à haute densité. Si cet enclos est en sol, l’aire d’alimentation
devra être concentrée afin de récupérer le fumier jusqu’à ce que les animaux
partent pour le pâturage. Si les animaux sont placés sur une dalle de béton,
une bonne régie de la litière devra également être appliquée.
Il
y a actuellement plusieurs producteurs qui utilisent des enclos à haute densité
en béton ou en asphalte. Ces enclos peuvent être gérés de deux façons
différentes : avec accumulation de fumier et de litière ou un nettoyage
périodique de l’aire bétonnée ou asphaltée.
Présentement,
il n'y a pas encore de directives émises par le ministère de l'Environnement
pour la gestion du fumier sur une dalle de béton. Cependant, le comité de
gestion du Guide a fait des recommandations au ministère à ce propos.
Dans
les deux cas, si cet enclos a été utilisé à l’automne, on doit nettoyer toute
cette surface aussitôt que les animaux sont déplacés vers l’enclos de faible
densité. Un bon nettoyage est essentiel pour que le fumier ne gèle pas à cet
endroit. Avant le retour des animaux au printemps suivant, la neige accumulée
doit être enlevée - si le fumier est resté dans l’enclos, cette opération sera
très difficile.
On
ne devrait jamais pousser la neige vers la bande végétative filtrante car ceci
occasionnerait plus d’écoulement et diminuerait son efficacité. La neige
accumulée peut être poussée dans la rigole de déviation, si elle est présente.
Si le producteur décide de gérer son enclos de haute densité en accumulation de fumier, il doit ajouter initialement de 75 à 100 mm de litière sur l’aire bétonnée et ajouter quotidiennement une quantité de 2 à 3 kg de litière par vache. Cependant, avec accumulation de litière, ce sera très difficile de garder les animaux propres surtout lors d'abondantes précipitations.
L’autre méthode serait de gratter régulièrement la surface bétonnée et de pousser le fumier à l’une des extrémités de cette aire si la surface est suffisamment grande. Sinon, le fumier peut être poussé hors de la surface bétonnée mais ailleurs que dans la bande végétative. Le fumier peut aussi être mis en amas au champ tel que décrit dans le Guide des bonnes pratiques. Pour un amas au champ, le taux d’humidité doit être inférieur à 80 %.
À
l’automne et au printemps, après chaque grattage, une couche d’environ 50 mm de
litière doit être appliquée. Le fumier pourrait également être épandu
directement au champ si le sol n’est pas gelé, ni couvert de neige.
La gestion de enclos d'hivernage doit être adaptée pour chaque entreprise Il existe plusieurs alternatives et celles-ci dépendent souvent des conditions météorologiques rencontrées.
*agr.,
conseiller en production bovine, MAPAQ - Outaouais-Laurentides