Pomme de terre, Avertissement No 13, 5 août 2022

Réseau d'avertissements phytosanitaires Avertissement - Pomme de terre
Conditions météo : températures près des moyennes saisonnières avec peu de précipitations. Développement de la culture : bonne croissance en général, poursuite de nécroses foliaires, belle qualité à la récolte. Insectes et acariens : adultes du doryphore actifs, cicadelle de la pomme de terre localement à suivre, pucerons et altises à surveiller. Maladies : présence du mildiou avec un 1er cas confirmé, d'autres cas émergent dans le sud de la province. Progression de la brûlure hâtive et de la dartrose, évolution variable d’autres pathogènes.
 
 
CONDITIONS MÉTÉOROLOGIQUES

Pour la période du 29 juillet au 4 août 2022, les températures ont été majoritairement près des moyennes saisonnières, et ce, presque partout en province. Une journée plus chaude a eu lieu le 1er août, avec 28 à 30 °C enregistrés. Un léger fléchissement du mercure a été observé par la suite, davantage dans les régions au nord et à l’est (voir le sommaire agrométéorologique). Du côté des précipitations, quelques perturbations sont passées les 29 juillet, le 2 août et/ou le 4 août, selon la région, ne laissant en général que peu de précipitations, sauf localement dont en Gaspésie et au Lac-Saint-Jean (voir la carte des précipitations des sept derniers jours). Dans la prochaine semaine, soit du vendredi 5 août au jeudi 11 août, le site d’Environnement Canada indique du temps chaud avant la venue de précipitations qui pourraient être significatives par endroits pour dimanche et/ou lundi.

 
DÉVELOPPEMENT DE LA CULTURE

Les champs pour une récolte d’entreposage présentent une belle allure dans la majorité des régions avec la phase de remplissage des tubercules (qui sont souvent en bon nombre) qui se poursuit bien à peu près partout. On observe toutefois, par endroits et pour certains cultivars, un début de stress et/ou de sénescence accélérée en lien avec un manque en eau et/ou un excès de chaleur. Un affaissement de plants dans les allées est aussi observé. Les systèmes d’irrigation fonctionnent dans plusieurs régions afin de soutenir un développement régulier des plants. Dans des secteurs comme au centre de la province, la floraison se maintient encore pour certains cultivars plus tardifs. On rapporte à nouveau pour cette semaine la présence de taches foliaires du même type que celles mentionnées la semaine dernière, et ce, dans de nouvelles régions (ex. : Outaouais, voir photo), avec parfois une hausse de leur incidence dans des parcelles déjà porteuses (ex. : région de Québec, Mauricie, Centre-du-Québec, Lanaudière). Le cultivar 'Goldrush' reste le plus touché. La ou les causes demeurent toujours à identifier, mais le fait que ce phénomène se produit en plusieurs endroits de la province pourrait indiquer qu'elles seraient en lien avec les conditions environnementales (ex. : stress de chaleur). Les récoltes de primeurs dans le sud de la province se poursuivent avec une belle qualité et de bons rendements. Dans celles plus au centre, les récoltes s’intensifient lentement, tandis qu’elles devraient débuter sous peu dans l’est et au nord.
 
 
Image Agri-Réseau

Taches sur le feuillage (Outaouais)

Photo : Isabelle Dubé, agr. (Groupe Pleine Terre), 4 août 2022

 


INSECTES ET ACARIENS


Les températures plutôt chaudes ont continué à favoriser l’activité du doryphore de la pomme de terre. Des adultes estivaux sont bien présents en bordures de certaines parcelles, avec même des envolées observées. Une nouvelle génération de larves est présente dans certains champs des secteurs au sud. Selon la date de la récolte prévue et la quantité de biomasse végétative présente, un contrôle peut être nécessaire selon les données du dépistage effectué. Le choix du produit utilisé doit toujours être différent de celui ou ceux utilisés précédemment (au semis et/ou en foliaire) afin de ne pas favoriser le développement d’une résistance.   

Selon le piégeage effectué par des collaborateurs, l’activité des adultes de la cicadelle de la pomme de terre (CPT) a varié selon la région et la parcelle, d’où l’importance d’un bon suivi à la ferme, champ par champ. Généralement, on mentionne des décomptes sous le seuil de nuisibilité retenu, sauf localement (ex. : Montérégie, Gaspésie). L'activité nymphale est davantage rapportée par endroits, ce qui demande également un suivi pour des cultivars à maturité plus tardive, particulièrement si des coupes de foin ont ou auront lieu à proximité.   

Les adultes de l’altise à tête rouge sont plus agressifs en bordures de certains champs, en particulier dans le centre de la province. Les dommages sont présentement tolérables, quoiqu’en hausse localement, ce qui pourrait nécessiter un contrôle dans les champs avec une biomasse foliaire plus limitée. Comme c'est le cas pour d’autres productions végétales, les populations de pucerons ont également augmenté en cours de période, mais de manière variable d’un champ à l’autre et d’une région à l’autre. En parcelles commerciales, une activité aussi à la hausse de prédateurs (ex. : coccinelles) et de parasitoïdes (ex. : guêpes Aphidius) est rapportée, ce qui peut permettre un contrôle naturel des pucerons.   

Les collaborateurs rapportent une activité plutôt faible de la punaise terne, de la pyrale du maïs et des tétranyques. Finalement, aucune capture du psylle de la pomme de terre (piégeage sous la supervision du MAPAQ) n’est à rapporter.
 

 

MALADIES

Comme mentionné dans l’alerte du 1er août dernier, un premier cas de mildiou de la pomme de terre a été rapporté cette saison au Québec, soit dans le sud de la province, dans une parcelle en pomme de terre. Cela représente le 1er cas répertorié par le RAP depuis 2017 (alors qu’il y avait eu 7 déclarations un peu partout en province). Les derniers rapports indiquent que le cas mentionné est sous contrôle. Toutefois, d’autres cas sont recensés dans les secteurs du sud de la province, dont Lanaudière (voir photos). Les producteurs des secteurs visés en particulier (Lanaudière et le sud-ouest de la province), mais aussi ailleurs au Québec, doivent : 
 
  • Dépister intensivement les champs pour y détecter toute trace possible de la maladie (particulièrement en situation d’irrigation, de temps humide et lorsque le feuillage des plants est encore vert).
  • Porter une attention particulière aux volontaires de pommes de terre (champs en rotation) et aux mauvaises herbes de la famille des solanacées (ex: morelles).
  • Poursuivre une protection fongicide régulière, en fonction des conditions météorologiques, jusqu’au défanage complet de la culture. Bien couvrir le feuillage des plants lors de la pulvérisation. Assurez-vous d’alterner les groupes de résistance des produits. La fréquence d’application doit également être ajustée selon des conditions météorologiques (en cours et à venir).
  • Utiliser des produits appropriés. Une liste de produits figure dans l’alerte du 1er août dernier.

Advenant qu’il y ait présence de mildiou, il faut :
 
  • Défaner rapidement et complètement les plants ou les champs atteints, sur une superficie deux fois plus grande que la zone atteinte et appliquer ensuite un produit ayant une action antisporulante.
  • Raccourcir l'intervalle entre l'application des fongicides et introduire des fongicides qui ont une action anticporulante dans la rotation des produits.
  • Récolter les champs affectés le plus tôt possible et éviter d’entreposer la récolte.
  • Éliminer les rebuts qui se trouvent dans l’exploitation.
  • Nettoyer la machinerie à la sortie du champ contaminé.

Si vous suspectez la maladie, contactez votre conseiller afin de prendre, au besoin, les mesures nécessaires. Vous pouvez également envoyer des échantillons au Laboratoire d’expertise et de diagnostic en phytoprotection du MAPAQ. 

Bien que le mildiou ne soit pas une maladie à déclaration obligatoire hors zone protégée, il s'agit d'un organisme nuisible réglementé. Ainsi, l'article 6 du Règlement sur la culture de pommes de terre stipule que: Lorsque la présence du mildiou est confirmée ou qu’un indice de cette présence est constaté, le propriétaire ou le gardien du bien infecté doit prendre des mesures pour éviter sa propagation, notamment l’application de traitements homologués en vertu de la Loi sur les produits antiparasitaires, la destruction des végétaux infectés ou le défanage de plants de pommes de terre.

La présence du mildiou dans notre province, ainsi que celui mentionné dernièrement en Ontario, représente une situation plutôt inusitée pour la saison en cours. En effet, d'après le site Web du USA Blight, aucun autre cas récent n’a été signalé en Amérique du Nord, ce qui limite actuellement leur nombre à deux seulement pour la saison 2022.
 
Image Agri-Réseau

Symptômes de mildiou 

Lanaudière, 5 août 2022

Image Agri-Réseau

Taches à la face inférieure d'une feuille montrant le développement d'un mycélium blanc à leur marge

Lanaudière, 5 août 2022


La brûlure hâtive (ou tache alternarienne) est rapportée partout en province, mais avec une incidence variable. Dans des secteurs du sud de la province, elle est plus active avec une migration à la hausse de taches vers l’étage médian de plants, principalement pour ceux en phase de sénescence et/ou d’échaudage. Ailleurs, les infections demeurent majoritairement sous contrôle. Des plants en santé supportent mieux les attaques possibles de ces champignons de type Alternaria (ex. : fertilisation raisonnée, apports réguliers en eau, rotation appropriée des cultures, etc.).

Des symptômes reliés à la dartrose sont maintenant rapportés dans plus de régions, surtout en terrains plus légers et dans des champs en phase de maturation. Les orages localisés et/ou les irrigations par temps chaud peuvent provoquer des infections. Une fois identifiée dans un champ, la dartrose est difficilement contrôlable par la suite en cours de saison.  

Le flétrissement verticillien a fait son apparition dans plus de champs des régions du centre et de l’est de la province, dans ceux avec un historique de présence, sous la forme de plants parfois isolés qui flétrissent. 

Les cas de jambe noire rapportés depuis le début de la saison ont progressé par endroits, conduisant à un dépérissement prématuré de plants. À ce stade-ci de la saison, il ne faut pas confondre cette maladie bactérienne avec des symptômes de la dartrose. On ne mentionne pas de tubercules contaminés lors d’échantillonnages faits.

Finalement, les collaborateurs rapportent peu d’activité dans les champs suivis du côté de la moisissure grise et de la moisissure blanche, avec une faible présence qui demeure concentrée sur le feuillage du fond des allées de parcelles plus végétatives.
 
Image Agri-Réseau

Tache alternarienne sur le feuillage de pomme de terre (Laurentides)

Jacynthe Paré, agr. (Services-conseils Profiteausol), 2 août 2022

 

Toute intervention envers un ennemi des cultures doit être précédée d’un dépistage et de l’analyse des différentes stratégies d’intervention applicables (prévention et bonnes pratiques, lutte biologique, physique et chimique). Le Réseau d’avertissements phytosanitaires (RAP) préconise la gestion intégrée des ennemis des cultures et la réduction des pesticides et de leurs risques. 

 
 
Cet avertissement a été rédigé par Patrice Thibault, agronome (RLIO) et révisé par la Direction de la phytoprotection (MAPAQ). Pour des renseignements complémentaires, vous pouvez contacter l'avertisseur du réseau Pomme de terre ou le secrétariat du RAP. La reproduction de ce document ou de l’une de ses parties est autorisée à condition d'en mentionner la source. Toute utilisation à des fins commerciales ou publicitaires est cependant strictement interdite.
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