Pomme de terre, Avertissement No 8, 27 juin 2025


Météo : forte chaleur et précipitations importantes. Développement de la culture : conditions plutôt favorables, apparition de nouveaux désordres physiologiques. Insectes : doryphore en progression avec présence de larves dans le sud et le centre de la province, progression légère ou faible activité des autres ravageurs. Maladies : aucun cas de mildiou, mais risques présents en plusieurs endroits, début ou faible progression d’autres pathogènes. Gestion des mauvaises herbes : poursuite d’interventions surtout en postlevée.

 
CONDITIONS MÉTÉOROLOGIQUES

Pour la période du 20 au 26 juin 2025, les températures ont graduellement augmenté pour atteindre des valeurs élevées et même extrêmes les 23 et/ou 24 juin par endroits, pour redescendre par la suite. Des maximums aussi hauts que 36-37 °C ont été enregistrés dans le sud de la province, dont dans Lanaudière. Ailleurs en province, le mercure a atteint des valeurs inférieures, mais parfois élevées. Les nuits sont également devenues plus chaudes et humides, mais pour se rafraîchir par la suite. Les vents ont été rapportés comme bien actifs certains jours (consultez le sommaire agrométéorologique). Les précipitations ont été variables en province, avec des cumuls plus importants dans les régions du centre et de l’est de la province. Par exemple, en incluant les précipitations du jeudi 19 juin, on atteint un cumul de plus de 100 mm de pluie pour certaines localités. Un orage intense a touché en particulier la grande région de Québec le 23 juin avec des vents à plus de 80 km/h et de fortes pluies localement (voir la carte des précipitations cumulées au cours des sept derniers jours). Pour la nouvelle période qui débute (soit du 27 juin au 2 juillet), Environnement Canada prévoit de la variabilité dans les prévisions en province. Un système dépressionnaire plutôt costaud devrait affecter plus les secteurs de l’ouest, du sud et certains du centre de la province en fin de semaine, avec des quantités appréciables sous des averses parfois orageuses. Les températures s’annoncent chaudes et humides dans le sud, plutôt variables dans le centre et saisonnières ailleurs.
 

DÉVELOPPEMENT DE LA CULTURE

Les collaborateurs rapportent une croissance plutôt active de la culture, mais encore de manière graduelle par endroits, parfois affectée par la forte chaleur des derniers jours. Des apports en eau ont été parfois nécessaires dans le sud de la province pour maintenir les sols humides et soutenir le développement des plants, avec moins de précipitations reçues qu’ailleurs en province. La pluie prévue devrait encourager les producteurs de cette région, mais pas en excès. Ailleurs, une pluviométrie plus importante a permis de bien humidifier les sols. On observe des désordres abiotiques ou physiologiques à la hausse en plusieurs endroits, le tout relié à la chaleur intense, comme de l’insolation foliaire ou des nécroses de chaleur (photo). Il y a plusieurs parcelles en floraison dans le sud et aussi au centre de la province. Des entre-rangs commencent à se fermer par endroits. Des températures près des moyennes de saison sont présentement plus favorables à la tubérisation, qui avait ralenti sous la forte chaleur. À nouveau cette semaine, on rapporte une levée inégale dans certaines parcelles, avec un écart important de stades phénologiques (photo). Ce phénomène est plus important que lors des dernières années. Les différents chantiers (sarclage, buttage, etc.) se sont poursuivis dans les secteurs du sud de la province et n'ont pu reprendre que tout dernièrement ailleurs, mais pas partout avec des sols encore trop humides. Le tableau 1 présente le développement de la culture de primeur dans différentes régions.
 
Image Agri-Réseau

Insolation ou nécrose de chaleur sur du feuillage jeune plus tendre d’un plant de pommes de terre (note : pas des taches de mildiou)
Photo : Maxime Brière, technol. prof., 25 juin 2025

 
Image Agri-Réseau

Levée inégale dans une parcelle en pomme de terre
Photo : Maxime Brière, technol. prof., 25 juin 2025 

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Autre exemple d’une levée complètement inégale avec un plant de pommes de terre en croissance active et l’émergence d’un planton voisin à venir (sol retiré ici pour y voir le germe à venir)
Photo : Patrice Thibault, agr. (RLIO inc.), 26 juin 2025



Tableau 1 : État d'avancement de la culture de primeur pour des producteurs types, rapporté par les collaborateurs du RAP (en date du 26 juin 2025)
 
Régions Stade de la culture
(primeur)1
2025 2024
Montérégie-Est et Montérégie-Ouest Floraison
Tubercules (ND)
Floraison à fin floraison
Tubercules : 5-8 cm
Outaouais Début floraison
Tubercules : 1-1,5 cm
Floraison
Tubercules : ND
Lanaudière Pleine floraison
Tubercules : 2-5 cm
Floraison à fin floraison
Tubercules : 5-8 cm
Centre-du-Québec et Mauricie Floraison
Tubercules : 1-3 cm
Floraison
Tubercules : 3-6 cm
Capitale-Nationale et Chaudière-Appalaches Floraison à début floraison
Tubercules : 1-2 cm
Floraison
Tubercules : 3-6 cm
Gaspésie, Bas-Saint-Laurent, Saguenay–Lac-Saint-Jean et Abitibi-Témiscamingue Plants : 20-25 cm* Plants : 25-35 cm
Tubercules : initiation
1. Selon votre emplacement, les stades atteints peuvent différer et être plus ou moins avancés.   *. Données partielles.   ND. Donnée non disponible

 
GESTION DES RAVAGEURS
 
Quoique variables, les conditions météo ont été favorables à la progression du doryphore de la pomme de terre dans les parcelles, mais moins que prévu en plusieurs endroits. Plus d’adultes, d’accouplements et de masses d’œufs sont remarqués dans le sud et le centre de la province. Un développement de larves est aussi rapporté, en particulier pour les champs sans traitement insecticide au semis. Des seuils d’intervention ont été atteints par endroits dans le sud, avec un contrôle fait ou en voie de l’être. Dans les régions plus centrales, un début de contrôle est en cours, mais dans peu de parcelles encore. Plus au nord et à l’est, on rapporte une activité en faible hausse des adultes par endroits, avec un tout début de ponte. Des traitements insecticides effectués au semis demeurent efficaces alors que d’autres ont perdu graduellement de leur efficacité dans le sud de la province. L’activité variable du doryphore démontre la nécessité de faire un dépistage champ par champ pour déterminer la nécessité d'intervenir et le bon moment pour le faire, s'il y a lieu. On rappelle qu’il faut choisir un produit de contrôle d’un groupe chimique différent que celui utilisé lors du semis, si c’est le cas. La présence d'auxiliaires est maintenant plus rapportée, comme la coccinelle maculée qui, en l’absence de pucerons, peut s’alimenter d’œufs du doryphore (photo).

La pression de la cicadelle de la pomme de terre (CPT) varie de nulle à légère, selon la parcelle et la région. Les captures sur les pièges sont à la hausse dans le secteur sud, mais encore sous le seuil d’intervention retenu, et beaucoup moins élevées que la saison dernière à la même période. Elles demeurent encore plutôt faibles dans le centre de la province (mais en hausse) et pratiquement nulles ailleurs. La présence de quelques adultes est signalée dans quelques champs, mais pas de nymphe sous le feuillage ni de symptômes foliaires associés à leur présence. On rappelle que des plants en santé supportent mieux de possibles attaques des CPT.

Concernant d’autres ravageurs d’intérêt, voici des observations rapportées :
  • la poursuite ou le début de dommages de vers gris, avec une activité locale dans quelques régions du sud et du centre, ayant un impact faible ou négligeable sur la culture. On rappelle qu’il faut creuser dans le sol à la base d’un plant pour y déceler les individus (voir photo);
  • des adultes et quelques nymphes de la punaise terne dans des parcelles du sud et du centre de la province, ne causant pas de dommages notables. Il faut bien identifier l’insecte en présence, car certains désordres abiotiques peuvent être confondus avec ces dommages;
  • de faibles captures (0-10 individus/piège/semaine) de pucerons dans des pièges-bols en zones semencières. Aucune observation d’individus en parcelles commerciales.
 
Image Agri-Réseau

Coccinelle maculée adulte sous une feuille d’un plant de pommes de terre
Photo : Patrice Thibault, agr. (RLIO inc.), 26 juin 2025

 
Image Agri-Réseau
Flétrissement d’une tige d’un plant de pommes de terre (en bas, sur la photo de gauche) avec le responsable identifié, soit un ver gris (photo de droite)
Le flétrissement aurait pu être associé à la présence de jambe noire également.
Photo : Patrice Thibault, agr. (RLIO inc.), 26 juin 2025 


GESTION DES MALADIES

Aucun symptôme de mildiou de la pomme de terre n’a été observé au Québec depuis le début de la saison. Au cours de la dernière période, les risques de développement du champignon ont varié à travers la province, étant plutôt élevés par endroits. Avec le temps plus humide à venir dans des secteurs du sud et du centre de la province en particulier, la vigilance demeure. Les averses orageuses représentent un des moyens de dispersion des spores du champignon. Les secteurs où la maladie a été identifiée en 2023 et 2024 demeurent plus à risque que les autres (car possible inoculum présent). Une protection fongicide devrait débuter ou se poursuivre selon la météo et le stade phénologique des plants, surtout en présence de nouvelles pousses végétatives. Le choix du produit de contrôle relève le plus souvent du cas par cas, mais il ne faudrait pas hésiter à utiliser un produit plus pénétrant si cela le justifie, même en ce début de saison. Il n’est pas trop tard pour l’usage d’un modèle prévisionnel et/ou l’installation de capteurs de spores.

Concernant ces derniers, l'Ontario rapporte le début de captures de spores de mildiou (voir le lien, en anglais), et ce, dans plusieurs secteurs du sud de cette province (Harrow, Port Lambton, Rondeau, Cedar Springs, Union Station et Simcoe). Également, un autre site Web (voir le lien, en anglais) fait état de captures récentes de spores dans le Maine (États-Unis), dans le comté d’Aroostook. Au Québec, des capteurs ont été installés dernièrement par endroits. La détection de spores demeure un outil à utiliser parmi d’autres dans la gestion du mildiou (ex. : dépistage des champs). Selon le site Web PlantAid, par USA Blight, aucun nouveau cas de mildiou de la pomme de terre n’a été répertorié en Amérique du Nord en cours de période.

À cette période-ci de la saison, il est important de vérifier les sources possibles de mildiou dans l’environnement des parcelles dont :
  • la présence possible de volontaires dans les champs en rotation, déjà présents par endroits. Les doryphores s’occupent souvent de ces plants en les défoliant, mais cela n’est pas suffisant. Un contrôle des volontaires est alors nécessaire (voir le lien, en anglais);
  • les tas de rebuts ou de déchets de la récolte précédente;
  • la présence de jardins privés ou communautaires à proximité, avec des cultures de tomates principalement.

Si vous observez des taches suspectes, il ne faut pas hésiter à contacter votre conseiller ou le Laboratoire d'expertise et de diagnostic en phytoprotection, au besoin, pour vérification.

Concernant d’autres maladies d’intérêt, voici des observations qui ont été rapportées :
  • Tache alternarienne (brûlure hâtive) : début très localement de symptômes associés, sur l’étage inférieur de plants, dans le sud de la province, mais aussi dans le centre, pour des plants plus avancés physiologiquement et des cultivars plus sensibles.
  • Pourriture de plantons : de nouveaux cas signalés, dont dans les secteurs du centre et plus au nord de la province. Cela est donc plus que par les saisons précédentes et conduira à des parcelles avec un taux de peuplement sous les attentes. 
  • Rhizoctone brun : de nouveaux cas rapportés en cours de période (centre de la province), sans impact trop négatif présentement.
  • Jambe noire : de nouveaux cas principalement dans le sud de la province et peu de progression de ceux déclarés précédemment. 
  • Dartrose : début ou poursuite d’un contrôle dans des parcelles de cultivars jugés plus à risque. Il est encore trop tôt pour en observer des symptômes.
  • Plants virosés : un peu plus de cas mentionnés par des collaborateurs (PVY), mais cela reste présentement à un niveau plutôt faible. 
  • Gale commune : aucune observation pour le moment.
 

GESTION DES MAUVAISES HERBES
 
Le contrôle des adventives se poursuit en plusieurs endroits, principalement en situation de postlevée de la culture, mais aussi de prélevée par endroits, pour certaines espèces en particulier, dans des conditions parfois difficiles (ex. : sol très humide, vent présent). On rapporte des infestations plus élevées que la normale dans des champs, après un traitement de prélevée. Il faut bien lire les étiquettes des produits disponibles pour vérifier la sensibilité des mauvaises herbes au désherbant choisi. 

 
Toute intervention envers un ennemi des cultures doit être précédée d’un dépistage et de l’analyse des différentes stratégies d’intervention applicables (prévention et bonnes pratiques, lutte biologique, physique et chimique). Le Réseau d’avertissements phytosanitaires (RAP) préconise la gestion intégrée des ennemis des cultures et la réduction des pesticides et de leurs risques.



Cet avertissement a été rédigé par Patrice Thibault, agronome (RLIO). Pour des renseignements complémentaires, vous pouvez contacter l'avertisseur du sous-réseau Pomme de terre ou le secrétariat du RAP. Édition : Marianne St-Laurent, agronome, M. Sc. et Cindy Ouellet (MAPAQ). La reproduction de ce document ou de l’une de ses parties est autorisée à condition d'en mentionner la source. Toute utilisation à des fins commerciales ou publicitaires est cependant strictement interdite.