Grandes cultures, Avertissement No 20, 22 août 2025


Pourriture à sclérotes : comment évaluer l'importance et quoi faire en cas d'infection. Jaunissement du soya en fin de saison et diagnostic des maladies. Ver-gris occidental du haricot : pensez à l'évaluation des dommages avant la récolte. Puceron du soya : les populations sont en diminution dans la plupart des régions.
 

COMMENT ÉVALUER L'IMPORTANCE DE LA POURRITURE À SCLÉROTES DANS LE SOYA ET QUOI FAIRE EN CAS D'INFECTION
Publication originale (2023) : T. Copley1, Y. Faucher2, V. Samson2 et B. Duval2
Mise à jour 2024 : M.-É. Cuerrier2, B. Duval2 et V. Samson2
Mise à jour 2025 : V. Samson2
1. Chercheuse (CÉROM); 2. Agronome (MAPAQ)

Des symptômes de la pourriture à sclérotes sont actuellement observés dans quelques champs de soya. On note la présence de pourriture accompagnée d’un mycélium blanc cotonneux sur les parties infectées, ainsi qu’un flétrissement et un dessèchement du feuillage. Une fois ces signes visibles, l’application d’un fongicide devient inefficace, car elle ne permet plus de freiner la progression de la maladie. L’usage de fongicides est uniquement recommandé à titre préventif, lorsque le soya se trouve à un stade sensible, soit entre les stades R1 et R3.

Bien que cette maladie puisse causer des pertes de rendement, ce n’est pas toujours le cas, même quand elle est répandue au champ. Il est donc recommandé d’évaluer la sévérité de la maladie dans les champs affectés au stade R7 du soya (début de la maturité), en calculant le « DSI » (Disease severity index ou indice de sévérité de la maladie). Selon la valeur de l’indice obtenue, des méthodes de lutte préventives pourront être recommandées afin de limiter les dommages occasionnés par la maladie lors des prochaines saisons de culture.

Voici comment calculer le DSI :
 
  • Choisir 5 à 10 stations de façon aléatoire dans le champ. Les stations devraient être représentatives de l’état général du champ et ne devraient pas se trouver uniquement dans des foyers symptomatiques.
  • Évaluer la sévérité de la maladie sur un minimum de 10 plants par station, soit 5 plants sur 2 rangs. Compter le nombre de plants se retrouvant dans chacune des catégories suivantes (voir photos plus bas) :
    • 0- Aucun symptôme de la pourriture à sclérotes;
    • 1- Maladie présente sur les branches latérales;
    • 2- Maladie présente sur la tige principale, mais les gousses sont saines et ne présentent pas de symptômes;
    • 3- Maladie présente sur la tige principale ET les gousses sont atteintes ou les plants symptomatiques sont flétris ou morts.
  • Calculer le DSI selon la formule suivante :
                   Image Agri-Réseau
 
Le DSI permet de déterminer si le seuil de dommages économiques a été atteint, c’est-à-dire si une application de fongicide foliaire aurait potentiellement été rentable. Aux États-Unis, le seuil de dommages économiques correspond à un DSI de 20 %. Au-delà de ce seuil, une application de fongicide est considérée rentable, tandis qu’entre 15 et 20 %, la rentabilité est variable selon différents facteurs, dont les coûts d’intrants, de main-d’œuvre et le prix du soya. Dans ce cas, des essais de fongicides pourraient aider à déterminer le seuil de dommages économiques dans nos conditions.

Pratiques recommandées en cas de pertes causées par la pourriture à sclérotes dans la culture du soya :
  • Effectuer une rotation de deux à trois ans avec des espèces non-hôtes, comme le maïs ou, idéalement, les céréales. Ces dernières, grâce à leur canopée plus dense, favorisent la fructification des sclérotes, ce qui contribue à réduire davantage la quantité d’inoculum au champ comparativement au maïs.
  • Choisir un cultivar de soya résistant à la pourriture à sclérotes. Le Réseau des Grandes Cultures du Québec (RGCQ) réalise chaque année des essais standardisés permettant d'évaluer le niveau de résistance des cultivars. Ces cotes sont également disponibles dans les catalogues de certains semenciers.
  • Adopter un espacement entre les rangs de 76 cm (30 po) ou, au minimum, de 38 cm (15 po) et réduire le taux de semis afin de favoriser le séchage du sol. Une canopée trop dense maintient l'humidité, ce qui favorise le développement des apothécies (structures fongiques produisant les spores infectieuses). Un espacement accru et une densité de semis réduite permettent un assèchement plus rapide du sol entre les pluies, diminuant ainsi les risques d'infection.
  • Éviter ls surfertilisation avec des engrais organiques. Un apport excessif en nutriments peut entraîner une croissance végétative trop vigoureuse, créant une canopée dense qui retient l'humidité et favorise l’apparition des apothécies.
  • Optimiser l'application des fongicides lorsque l'utilisation est justifiée. Leur efficacité dépend du moment et de la qualité de l'intervention. Il est recommandé de traiter lorsque le soya est aux stades sensibles (R1 à R3) en assurant une couverture uniforme, notamment des fleurs, pour maximiser l'effet du traitement. 
  • Privilégier le semis direct. Les champs en semis direct sont souvent moins touchés par la pourriture à sclérotes, car les sclérotes laissés en surface sont plus exposés aux conditions défavorables telles que le gel, les insectes ou les maladies, ce qui limite leur survie.
 
Image Agri-Réseau

Exemple de Catégorie 1 : symptômes sur les branches latérales seulement

Source : soybeanresearchinfo.com

 
Image Agri-Réseau

Exemple de Catégorie 2 : tige principale atteinte, sans symptôme sur les gousses

Source : Midwest Farmer's Report

Image Agri-Réseau

Exemple de Catégorie 3 : tige principale et gousses atteintes par la maladie

Source : Jaime Cummings - NYS IPM Program (Université Cornell)

 

JAUNISSEMENT DU SOYA EN FIN DE SAISON ET DIAGNOSTIC DES MALADIES
Publication originale août 2024 :  B. Duval2 et V. Samson2
Mise à jour août 2025 : V. Samson2 et J. Saguez1
1. Chercheur (CÉROM); 2. Agronome (MAPAQ)

À cette période de l’année, il est courant d’observer un jaunissement dans certains champs de soya. Ce phénomène correspond à la sénescence naturelle des plants et peut donc être tout à fait normal. Toutefois, il est important de rester vigilant, car d’autres facteurs peuvent également être en cause. Par exemple, certaines maladies foliaires comme la tache brune, le mildiou ou la brûlure bactérienne – généralement peu dommageables pour le rendement – peuvent aussi se manifester à ce moment. On peut également observer des symptômes associés au syndrome de la mort subite ou à la présence du nématode à kyste du soya (NKS). La sécheresse peut aussi contribuer au jaunissement, en provoquant un stress hydrique qui affecte la physiologie des plants. La présence de tétranyques à deux points, un acarien favorisé par le temps chaud et sec peut aussi être observée. Les feuilles ou les zones de champs infestées par ce ravageur apparaissent jaunâtres, bronzées ou argentées/transparentes. À la mi-août, la diminution de la durée du jour stimule l'entrée en diapause des femelles qui cesseront de s'alimenter pour migrer ensuite dans le couvert végétal, afin de s'y abriter pour l'hiver.

Un bon diagnostic phytosanitaire est essentiel pour bien comprendre la situation et orienter les interventions à planifier pour les saisons suivantes. En cas de doute, n’hésitez pas à consulter votre conseiller(ère) agricole ou à faire parvenir des échantillons de plantes au Laboratoire d’expertise et de diagnostic en phytoprotection du MAPAQ.

Pour plus d’information :
  • Jaunissement du soya en fin de saison : sénescence normale ou problème phytosanitaire;
  • Les maladies foliaires du soya en fin de saison;
  • Le nématode à kyste du soya;
  • Syndrome de la mort subite du soya (avertissement N° 18 du 8 août 2025);
  • Fiche technique Tétranyque à deux points dans le soya;
  • Sécheresse en cours : symptômes, ressemblances avec certaines maladies et observations à prévoir (avertissement N° 19 du 15 août 2025).


VER-GRIS OCCIDENTAL DU HARICOT : PENSEZ À L'ÉVALUATION DES DOMMAGES AVANT LA RÉCOLTE
J. Saguez1, C. Rieux2 et V. Samson2
1. Chercheur (CÉROM) 2. Agronome (MAPAQ)

Les larves (chenilles) du ver-gris occidental du haricot (VGOH) figurent parmi les principaux ravageurs des épis dans le maïs grain et ensilage.
 
Image Agri-Réseau

Larves de VGOH à différents stades de développement et dommages causés aux épis

Source : J. Saguez (CÉROM)


La qualité des épis et de la récolte peut être altérée par la présence des larves, de trous et galeries au niveau des spathes et des épis. Ce sont d’éventuelles portes d’entrée pour d’autres insectes (ex : nitidules, adultes de chrysomèles des racines du maïs), pour des prédateurs des larves (étourneaux, corneilles) et des maladies, notamment la fusariose. Cette dernière peut d’ailleurs être à l’origine du développement de mycotoxines qui peuvent être problématiques pour la santé du bétail (ex : problèmes gastro-intestinaux, reproductifs, diminution de production).

Il est trop tard actuellement pour intervenir, car les larves de VGOH sont bien cachées dans les épis. Toutefois, une évaluation des dommages peut être utile pour connaître le taux d’infestation de la culture et les risques potentiels pour le bétail.

L’évaluation des dommages aux épis peut se faire en épluchant 100 épis répartis aléatoirement dans le champ (ex : 10 épis à 10 endroits distincts ou 5 épis à 20 endroits). Cela donnera une idée du taux d’infestation par cet insecte. Notez qu’il n’y a aucun seuil d’intervention basé sur un taux d’infestation.

L’évaluation des dommages aux épis peut aussi être utile pour décider si une stratégie devrait être mise en place l’an prochain, comme par exemple, l’utilisation d’hybrides exprimant du Vip3A qui protège le maïs contre le VGOH .

Pour en savoir plus :
  • Maïs exprimant des protéines insecticides disponibles au Canada et statut de la résistance;
  • Fiche technique Ver-gris occidental des haricots dans le maïs (grain et ensilage);
  • Vidéo Le ver-gris occidental des haricots : biologie, dépistage et stratégies d’intervention.
 

PUCERON DU SOYA : LES POPULATIONS SONT EN DIMINUTION DANS LA PLUPART DES RÉGIONS
J. Breault1
1. Agronome (MAPAQ)

La plupart des champs de soya dépistés cette semaine par le RAP Grandes cultures sont au stade R5 (premières graines) ou R6 (grossissement des graines). Le risque de dommages causés par le puceron du soya est donc faible. À partir du stade R5, les pertes de rendements deviennent peu probables et les traitements phytosanitaires sont très rarement rentables. Les populations du puceron du soya sont en baisse dans la plupart des régions, sauf en Chaudière-Appalaches, où elles augmentent dans la majorité des sites. Les populations de quelques sites sont stables ou en augmentation dans la Capitale-Nationale, le Centre-du-Québec, l'Estrie, les Laurentides et la Montérégie-Ouest. Les ennemis naturels sont actifs et contribuent au contrôle du puceron. De plus, la baisse de la photopériode entraînera bientôt la migration des pucerons ailés vers leur hôte d’hiver, le nerprun.
 
Tableau 1 : Sommaire des populations moyennes du puceron du soya par région pour 67 sites du réseau de surveillance pour la semaine débutant le 18 août 
Image Agri-Réseau

Pour plus de détails sur l’évolution des populations depuis le début juillet, consultez le tableau des populations de pucerons par site en cliquant ici. Cette semaine étant la dernière semaine de dépistage du réseau de surveillance du puceron du soya du RAP Grandes cultures, cet avertissement est le dernier de la saison.

 
Toute intervention envers un ennemi des cultures doit être précédée d’un dépistage et de l’analyse des différentes stratégies d’intervention applicables (prévention et bonnes pratiques, lutte biologique, physique et chimique). Le Réseau d’avertissements phytosanitaires (RAP) préconise la gestion intégrée des ennemis des cultures et la réduction des pesticides et de leurs risques.


 
Pour des renseignements complémentaires, vous pouvez contacter le secrétariat du RAP. Édition : Laurianne Pichette, agr.-phytopathologiste et Lise Bélanger (MAPAQ). La reproduction de ce document ou de l’une de ses parties est autorisée à condition d'en mentionner la source. Toute utilisation à des fins commerciales ou publicitaires est cependant strictement interdite.