Grandes cultures, Avertissement No 46, 25 août 2017

Réseau d'avertissements phytosanitaires, RAP, réseau Grandes cultures, avertissement

La période la plus propice pour effectuer le dépistage de l’ériochloé velue, une espèce à déclaration obligatoire, se situe entre la mi-août et la fin de septembre. Cette plante est facilement reconnaissable par ses inflorescences dont les branches latérales, toutes étalées sur le même plan, font penser à celles du pied-de-coq. Les feuilles, très velues, sont pourvues de poils sur leurs deux faces, ce qui leur confère un toucher velouté.

 
C'EST LE TEMPS DE DÉPISTER L'ÉRIOCHLOÉ VELUE; UNE MAUVAISE HERBE À DÉCLARATION OBLIGATOIRE
 
 
État de la situation
Au Canada, l’ériochloé velue a été rapportée pour la première fois en 2000, en Montérégie. Selon l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA), en 2013, le nombre de sites où la présence de la plante avait été confirmée était de 32. Ces sites étaient répartis dans 13 municipalités du Québec, majoritairement situés en Montérégie, mais également en Mauricie et dans Lanaudière.
 
Pour prévenir la dissémination de l’ériochloé velue, les producteurs doivent assurer un bon contrôle de la plante au champ et nettoyer la machinerie ayant circulé dans une zone infestée afin de la départir de la terre ou de tous débris végétaux qui auraient pu y adhérer1. L’ériochloé velue est réglementée en vertu de la Loi sur les semences. Sa présence est donc interdite dans tout lot de semence vendu ou importé au Canada. L’ériochloé velue est également réglementée en vertu de la Loi sur la protection des végétaux. Bien que l’ACIA ait suspendu l’application de ses mesures réglementaires, les producteurs aux prises avec l’ériochloé velue doivent mettre en place des pratiques exemplaires de gestion s’ils veulent réduire sa présence, limiter sa propagation et minimiser les pertes de rendement qu’elle occasionne. Au cours des années 2012-2013, le Centre de recherche sur les grains (CÉROM), en collaboration avec le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ), a accompagné ces producteurs et leurs conseillers dans la mise en place de plans d’action.

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1. À cet effet, consulter La biosécurité dans le secteur des grains - Trousse d’information, notamment les fiches 2, 2A, 2B et 2C. https://www.agrireseau.net/grandescultures/documents/93717/la-biosecurite-dans-le-secteur-des-grains-trousse-d_information


Caractéristiques de l’espèce
L'ériochloé velue (Eriochloa villosa [Thumb.] Kunth) est une graminée annuelle de grande taille pouvant atteindre 1,5 mètre de hauteur. La plante est facilement reconnaissable par ses inflorescences dont les branches latérales, toutes étalées sur le même plan, font penser à celles du pied-de-coq. Les feuilles sont très velues comme celles de la sétaire géante. Par contre, les poils, présents sur les deux faces des feuilles, sont très courts, ce qui confère un toucher velouté. Le développement végétatif de la plante est comparable à celui du panic millet.

Pour plus d’information, il est possible de voir les spécimens représentatifs de la plante conservés à l’Herbier du Québec. Les photos (cliquables pour agrandissement) sont disponibles sur l'Herbier du Québec).
 
Sur son site Web, l’ACIA présente aussi de l’information générale sur l’ériochloé velue ainsi que sur la gestion des risques phytosanitaires associés à cette mauvaise herbe : Fiche de renseignement – Ériochloé velue – Eriochloa villosa.
 
Finalement, une fiche présentant une mise à jour de l’information concernant l’ériochloé velue a été élaborée par le CÉROM en 2013.


 
Photo 1 : Ériochloé velue dans un champ de soya
Crédit photographique : Marie-Josée Simard, AAC


Une espèce problématique
Les plants d’ériochloé velue se développent rapidement et les inflorescences apparaissent au début du mois d'août. La plante est prolifique; elle produit des graines jusqu'à la fin du mois d’octobre. Sous nos conditions, un plant peut produire plus de 50 000 graines. Les graines sont volumineuses (près de 3 mm de diamètre) et peuvent survivre dans le sol pendant une longue période (5 ans).
 
L’ériochloé velue est particulièrement problématique, car les graines de cette espèce germent tout au long de la saison. Certains plants peuvent ainsi facilement échapper au contrôle des herbicides appliqués au printemps. Les opérations mécaniques (sarclage, billonnage) favorisent la germination de nouvelles plantules d’ériochloé velue. D’autres caractères remarquables de l’espèce contribuent à rendre le contrôle de cette plante difficile :
  • Une germination pouvant s’effectuer à différentes profondeurs et températures de sol;
  • Un développement végétatif vigoureux. 
Un projet de recherche du CÉROM permettant d’évaluer différents moyens de désherbage de l’ériochloé velue a été réalisé chez un producteur aux prises avec la plante (2012-2014). Ces travaux ont démontré qu’une répression de la plante (> 80 %) est obtenue dans les cultures de maïs et de soya lorsque deux traitements herbicides séquentiels sont appliqués : un premier en prélevée et un deuxième en postlevée ou deux traitements en postlevée. Les herbicides de prélevée utilisés seuls n’offrent pas une activité résiduelle suffisamment longue pour éviter la germination de nouvelles plantules de cette adventice.
 
Une deuxième intervention en postlevée est donc importante pour atteindre les plantules qui auront germé suivant la première intervention phytosanitaire. Le blé, une culture à écartements étroits dont la croissance démarre rapidement au printemps, est très compétitif envers l’ériochloé velue. Même si aucun herbicide antigraminées n’est homologué pour le contrôle spécifique de l’ériochloé dans les céréales, un traitement appliqué en postlevée des céréales visant une autre graminée permettra de compléter le désherbage de l’ériochloé. De plus, suivant la récolte de la céréale, des interventions postrécoltes sont nécessaires (ex. : travail de sol, semis d’un engrais vert, brûlage,) afin de maintenir la répression de l’ériochloé velue jusqu’à l’automne. Vous trouverez plus d’information concernant les résultats préliminaires de ces travaux en cliquant ici.
 
 
Le dépistage
La période la plus propice pour réaliser le dépistage se situe entre la mi-août et la fin de septembre, lorsque l'ériochloé velue est en floraison. Sur le terrain, il faut surveiller particulièrement les entrées et les bordures des champs, car ces zones sont souvent moins bien couvertes par les pulvérisations herbicides et moins bien travaillées lors des opérations de sarclage.
 
Dans les champs de petites céréales, le dépistage est très difficile à partir du moment où la culture commence à taller. Un dépistage effectué lorsque la plante cultivée est à maturité et que les feuilles sont affaissées est souhaitable et efficace.
 
Si l’ériochloé velue est détectée, il est recommandé de prendre les mesures nécessaires pour éviter la production de semences viables.
 
L'ériochloé velue peut être introduite accidentellement sur la ferme, entre autres par de la machinerie contaminée. Une attention spéciale doit être portée lors de la réalisation de travaux agricoles effectués par un entrepreneur (travail à forfait).


 
Photo 2 : Ériochloé velue dans un champ de maïs
Crédit photographique : Marie-Josée Simard, AAC


Une espèce à déclaration obligatoire
L'article 5 de la Loi sur la protection des végétaux stipule que « Quiconque constate la présence de ce qu'il croit être un parasite dans une zone où celui-ci n'était pas connu auparavant doit en faire sans délai la déclaration au ministre accompagnée d'un spécimen ». En conséquence, malgré le fait que les mesures réglementaires soient levées pour le moment, l'ériochloé velue rencontre la définition d'un parasite, donc sa déclaration à l'ACIA est obligatoire. Vous devez informer le bureau de l’ACIA le plus près du site de présence.
 
 
Interventions
L'expérience acquise montre que l’encadrement agronomique des producteurs aux prises avec l’ériochloé velue permet de contrôler très efficacement la plante et d'empêcher sa dissémination à l'intérieur et à l'extérieur de la ferme. Dans plusieurs cas, l'éradication de l’ériochloé velue est envisagée à court ou moyen terme. Votre implication est essentielle pour contrer efficacement cette mauvaise herbe.
  
 

Cet avertissement a été mis à jour par Marie-Édith Cuerrier, agr., avec la collaboration d’Isabelle Fréchette, agr., Romain Néron, agronome-botaniste et Véronique Samson, agr., à partir d’un avertissement paru en 2014 écrit par Romain Néron, agronome-botaniste, Catherine Thibault, agr. et Mélanie Gauthier, ACIA. Pour des renseignements complémentaires, vous pouvez contacter les avertisseurs du réseau Grandes cultures ou le secrétariat du RAP. La reproduction de ce document ou de l’une de ses parties est autorisée à condition d'en mentionner la source. Toute utilisation à des fins commerciales ou publicitaires est cependant strictement interdite.
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