
Conditions météo : début de période fraîche et sèche avant la venue de températures plus chaudes et de précipitations significatives par endroits. Développement de la culture : conditions plutôt favorables avec la venue de précipitations, fin généralisée des semis, apparition de quelques désordres physiologiques. Insectes : doryphore plus actif, présence de jeunes larves dans le sud et le centre de la province, vers gris à surveiller, faible activité des autres ravageurs. Maladies : cas de pourriture de plantons stabilisés, aucun cas de mildiou, mais météo à venir plus favorable, début de jambe noire et de plants virosés. Gestion des mauvaises herbes : poursuite des interventions en pré et/ou postlevée selon le cas, présence de phytotoxicité. Détection de la résistance aux insecticides chez le doryphore : appel à la collaboration.
Pour la période du 13 au 19 juin 2025, des températures généralement fraîches ont été enregistrées du 13 au 16 juin, avec un mercure variant la nuit entre 5 et 10 °C. Une nuit a été plus froide le 14 juin avec des valeurs sous (ex. : Témiscamingue) ou un peu au-dessus du point de congélation (ex. : Lac-Saint-Jean, Capitale-Nationale, Mauricie). À partir du 16 juin, une masse d’air chaud a subitement augmenté le mercure à des valeurs au-dessus des moyennes de saison (27-29 °C) partout en province (consultez le sommaire agrométéorologique). Des précipitations ne sont survenues qu’en toute fin de période (le 18 et/ou le 19 juin), avec des quantités significatives par endroits (voir la carte des précipitations cumulées au cours des sept derniers jours et la figure 1 ci-dessous). Pour la nouvelle période qui débute (soit du 20 au 26 juin), Environnement Canada mentionne la poursuite des précipitations pour vendredi en plusieurs endroits, puis de manière variable selon la région pour les jours suivants. Les températures s’annoncent de saison à parfois chaudes, plus élevées dans le sud de la province (jusqu’à 34 °C lundi et mardi).
DÉVELOPPEMENT DE LA CULTURE
Les collaborateurs rapportent une croissance améliorée de la culture en cours de période, mais cela n’a pas encore permis de rattraper le retard sur la saison dernière. Pour les parcelles à un stade plus avancé, la pousse végétative est bonne avec un début de floraison par endroits, et ce, malgré le temps sec connu. La venue des précipitations sera la bienvenue, sans excès. L’irrigation a été pratiquée dans des parcelles du sud et du centre de la province avec un effet bénéfique. Cependant, pour certains semis plus tardifs, la levée a continué à être un peu plus longue que prévu, à la suite des nuits plus fraîches du début de la période. On rapporte une émergence passablement décalée dans un même champ. Quelques désordres physiologiques ou abiotiques reliés à la météo sont apparus en cours de période comme de l’insolation foliaire et la formation de microtubercules à des plantons (voir photo). Le cultivar 'Reveille Russet' présente encore cette année des anomalies en début de croissance (ex. : inégalité de croissance des plants, feuillage un peu fripé) (voir photo). Ce phénomène a été en partie atténué par des producteurs avec un bon conditionnement (réchauffement) de la semence. Les différents chantiers (sarclage, buttage, etc.) étaient en mode accéléré avant la venue des précipitations du 19 juin. Les semis se sont terminés dernièrement à peu près partout en province, mais certaines zones de parcelles encore trop humides ne seront pas plantées par endroits. Le tableau 1 présente le développement de la culture de primeur en différentes régions.
Régions | Stade de la culture (primeur)1 |
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2025 | 2024 | |
Montérégie-Est et Montérégie-Ouest | Début floraison Tubercules : ND |
Début floraison à floraison Tubercules : 4-8 cm |
Outaouais | Début bouton floral | Début floraison |
Lanaudière | Début floraison Tubercules : 1 cm |
Floraison Tubercules : 4-8 cm |
Centre-du-Québec et Mauricie | Quelques fleurs à bouton floral Début tubérisation (< 1 cm) |
Floraison Tubercules : 2-4 cm |
Capitale-Nationale et Chaudière-Appalaches | Début bouton floral à bouton floral | Début floraison à floraison Tubercules : 1-3 cm |
Gaspésie, Bas-Saint-Laurent, Saguenay–Lac-Saint-Jean et Abitibi-Témiscamingue | Plants : 10 cm* | Plants : 25-30 cm |
La chaleur des derniers jours a favorisé une hausse de l’activité de certains insectes dans les régions du sud et du centre de la province, ce qui demande maintenant un suivi plus serré des champs.
Les adultes du doryphore de la pomme de terre sont maintenant actifs dans toutes les régions de la province. Dans les secteurs du sud et de certains du centre, les populations sont plus importantes avec une ponte à la hausse et la présence de jeunes larves (stades 1 et 2) est remarquée dans des parcelles à un stade plus avancé. Des traitements insecticides effectués au semis demeurent efficaces alors que d’autres semblent avoir perdu de leur efficacité. Des interventions auront lieu sous peu par endroits, surtout avec le temps chaud dans les prévisions. Il faut éviter si possible de traiter lors de températures trop élevées afin de diminuer les risques de phytotoxicité à la culture, mais aussi pour obtenir une performance maximale du ou des produits utilisés.
Les captures des adultes de la cicadelle de la pomme de terre (CPT) sont encore faibles sur les pièges installés par des collaborateurs, avec des décomptes de moins de 5 individus/piège/semaine, dans le sud et le centre de la province. Elles sont donc moins nombreuses, ou en retard, par rapport à la saison dernière. On ne rapporte pas d’activité d’adultes ou de nymphes sur le feuillage ni de symptômes associés à leur présence. Les parcelles sans insecticides au semis sont les plus à risque, donc celles où les pièges collants jaunes doivent être installés en priorité. Depuis quelques années, le seuil indicatif de 25 individus/piège/semaine est utilisé par des collaborateurs du RAP, en lien avec l’expérience acquise et des essais menés par le Carrefour industriel et expérimental de Lanaudière (CIEL). Des plants en santé et en croissance active supportent mieux les attaques des CPT, autrement le seuil proposé devrait être ajusté en conséquence, soit à la baisse. Il est important de bien utiliser les pièges (ex. : bon positionnement dans le champ, ajustement de leur hauteur en saison, changement au besoin, relevés réguliers, deux côtés du piège avec la surface collante, bonne identification de l’espèce présente, etc.). Malheureusement, on ne connaît pas ou peu de méthodes alternatives efficaces aux pesticides (ex. : prédateurs) pour lutter contre la CPT.
Une hausse de l’activité des vers gris est rapportée dans les secteurs du sud alors que cela débute dans des secteurs du centre. Ces chenilles coupent des tiges au ras du sol, en grugent le collet et/ou mangent du feuillage touchant à la surface du sol. Elles sont actives la nuit, particulièrement en période de temps chaud. Il faut creuser le sol autour du plant qui présente des dommages pour les observer. Il n'y a pas de seuil d’intervention connu dans la pomme de terre au Québec, c'est donc du cas par cas. Cela dépend de plusieurs facteurs, dont l'espèce en présence, la grosseur des larves, la température en cours et à venir, le stade de développement de la plante ainsi que la vigueur des plants, la superficie touchée (juste en bordure ou non, pour un possible traitement localisé), etc. Il y a des produits plus efficaces que d'autres selon la température.
Concernant d’autres ravageurs d’intérêt, voici des observations rapportées par des collaborateurs :
- un début d’activité localisée des adultes de la punaise terne (ex. : Outaouais);
- peu ou pas de nouveaux cas de vers fil-de-fer;
- aucune activité de pucerons, avec un suivi plus serré qui débute ou va débuter sous peu en zones semencières.
Le temps plus sec de la dernière période semble avoir réduit le développement de pourriture de plantons et favorisé une levée acceptable dans les sites affectés. La situation demeure variable selon la région, la date de semis, le cultivar et le type de sol, entre autres. Des parcelles dans des secteurs sud et centre de la province sont plus touchées que d’autres. Des semis ont finalement été refaits dans quelques sections de champs à la suite d’un taux de levée trop inégal. Des analyses en laboratoire se poursuivent pour en identifier le ou les organismes responsables.
Très peu de nouveaux cas de rhizoctone brun ont été mentionnés en cours de période ainsi que très peu de progression de ceux déjà déclarés.
Aucun symptôme de mildiou de la pomme de terre n’a été observé au Québec depuis le début de la saison. Avec le temps plus humide en cours, accompagné de précipitations, la vigilance demeure, surtout pour les secteurs où la maladie a été identifiée en 2023 et 2024 (car possible inoculum présent). Le début d’une protection fongicide est de mise pour les parcelles avec des plants plus avancés dans les secteurs sud et centre de la province. L’usage d’un modèle prévisionnel (ex. : Miléos) et/ou l’installation de capteurs de spores (selon le cas) devraient débuter. Comme il a déjà été mentionné, la prévention doit se poursuivre avec une bonne gestion des volontaires qui commencent à émerger dans des parcelles en rotation et aussi des rebuts de tubercules issus de la récolte 2024. Si vous observez des taches suspectes, il ne faut pas hésiter à contacter votre conseiller, au besoin, pour vérification. Selon le site Web PlantAid, par USA Blight, aucun nouveau cas de mildiou de la pomme de terre n’a été répertorié en Amérique du Nord en cours de période.
Les conférences de la série de Webinaires sur le mildiou de la pomme de terre, qui se sont déroulées en 2024, sont disponibles en vidéo, n'hésitez pas à aller les voir ou les revoir.
Des premiers cas de jambe noire ont été rapportés pour certains cultivars, dont 'Colomba' qui est reconnu comme plus sensible. C’est également le cas pour des plants virosés (avec le PVY soupçonné) dans des cultivars comme 'Atlantic', 'Chieftain' et 'Goldrush'.
Aucun symptôme relié à l’activité de la tache alternarienne (brûlure hâtive) n’a été signalé. Elle se présente plus à partir de la fin juin et/ou lors de la floraison des plants de pommes de terre. Cette maladie en est souvent une de faiblesse, c’est-à-dire pour des plants plus avancés physiologiquement, en situation de stress (ex. : forte chaleur, sécheresse prononcée, attaques d’insectes) dans un sol avec une fertilité parfois déséquilibrée.
Finalement, le contrôle préventif de la dartrose débute dans des parcelles de cultivars jugés plus à risque dans le sud de la province.
Les interventions avec des désherbants de prélevée de la culture sont terminées en plusieurs endroits, mais se poursuivent ailleurs. Leur efficacité a été rapportée comme bonne, mais des retouches sont parfois nécessaires pour contrôler certaines mauvaises herbes (ex. : graminées, chénopode). Le choix du produit de contrôle en postlevée de la culture devrait se faire en fonction des espèces présentes et aussi en tenant compte du délai d’attente avant la récolte (bien lire les étiquettes à ce sujet). Des cas de phytotoxicité sont apparus en cours de période en lien avec une application de métribuzine et/ou de linuron (voir photos) alors que des plants de pommes de terre étaient en tout début d’émergence.
DÉTECTION DE LA RÉSISTANCE AUX INSECTICIDES CHEZ LE DORYPHORE – APPEL À LA COLLABORATION
Dans le cadre d’un projet de recherche financé par le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation (MAPAQ) et mené par l'Institut de recherche et de développement en agroenvironnement (IRDA), le Laboratoire d’expertise et de diagnostic en phytoprotection (LEDP) a récemment acquis une nouvelle méthodologie permettant de détecter la résistance du doryphore de la pomme de terre à cinq insecticides : ACTARA, DELEGATE, ENTRUST, TITAN et VERIMARK.
Bien que le rapport final ne soit pas encore accessible en ligne, les bioessais réalisés dans le cadre du projet confirment la présence de résistance chez plusieurs populations de doryphores au Québec. Étant donné la complexité et le coût élevé de ces tests, une approche moléculaire a été développée pour détecter la surexpression de gènes associés à la résistance pour certains de ces insecticides.
L’intégration complète de ces méthodologies au LEDP est toujours en cours. Cependant, l'objectif est de commencer à les mettre à l’épreuve dès cet automne à l’aide d’échantillons récoltés durant l’été et provenant de différentes régions du Québec. Si vous souhaitez participer à cette phase de validation, vous pouvez contacter Jean-Philippe Légaré, entomologiste au LEDP, afin de convenir des modalités d’envoi et de traitement des spécimens.
Lien utile : Projet sur la résistance aux pesticides chez le doryphore – IRDA
Toute intervention envers un ennemi des cultures doit être précédée d’un dépistage et de l’analyse des différentes stratégies d’intervention applicables (prévention et bonnes pratiques, lutte biologique, physique et chimique). Le Réseau d’avertissements phytosanitaires (RAP) préconise la gestion intégrée des ennemis des cultures et la réduction des pesticides et de leurs risques. |
Cet avertissement a été rédigé par Patrice Thibault, agronome (RLIO). Pour des renseignements complémentaires, vous pouvez contacter l'avertisseur du sous-réseau Pomme de terre ou le secrétariat du RAP. Édition : Marianne St-Laurent, agr., M. Sc. et Cindy Ouellet (MAPAQ). La reproduction de ce document ou de l’une de ses parties est autorisée à condition d'en mentionner la source. Toute utilisation à des fins commerciales ou publicitaires est cependant strictement interdite.
